Tech- Dans le viseur aux Etats-Unis et en Europe, qui veut la peau de TikTok ?

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Alors que l’application est dans le viseur des deux côtés de l’Atlantique, le réseau social chinois fait face à une commission d’enquête en France. Pour sortir de cette spirale, TikTok cherche la parade.

Le réseau social TikTok connaît une mauvaise passe. Pas tant dans ses chiffres d’utilisateurs qui ne cessent de croître. C’est la régulation qui s’active des deux côtés de l’Atlantique. Retour sur une semaine compliquée pour le réseau social chinois qui cherche à rassurer.

Avec plus d’un milliard d’utilisateurs actifs dans le monde, TikTok pointe à la sixième place des plateformes sociales les plus utilisées, selon le dernier rapport de We Are Social sur l’évolution du numérique, publié en janvier. L’Europe est le premier marché de TikTok avec 150 millions d’utilisateurs, dont 25 millions au Royaume-Uni. Au niveau mondial, l’application revendique plus d’un milliard d’utilisateurs.

TikTok avait reconnu en novembre que certains employés en Chine pouvaient accéder aux données d’utilisateurs européens, et avait admis en décembre que des employés avaient utilisé ces données pour traquer des journalistes. Mais le groupe nie tout contrôle ou accès du gouvernement chinois à ses données.

Interdiction d’utilisation pour les agences fédérales américaines

C’est la Maison Blanche qui a ouvert le bal le 28 février. Les agences fédérales américaines devront s’assurer que leurs appareils ne sont plus dotés de l’application de vidéos TikTok sous 30 jours, a ordonné lundi le Bureau de la gestion et du budget à la Maison Blanche (OMB). Détenue par l’entreprise chinoise ByteDance, TikTok a été prise pour cible par les législateurs américains qui considèrent l’application comme une menace à la sécurité nationale, et avaient interdit son usage sur les appareils des fonctionnaires dans une loi votée fin décembre.

L’ordre de l’OMB est pris en application de cette loi, ratifiée début janvier par le président Joe Biden. Dans un mémorandum, la directrice de ce bureau, Shalanda Young, a demandé aux agences gouvernementales de “supprimer et d’interdire les installations” de l’application sur les appareils leur appartenant ou gérés par elles, et d'”interdire le trafic internet” depuis ces appareils vers l’application. L’ultrapopulaire plateforme de vidéos courtes et virales, propriété de l’entreprise chinoise ByteDance, est de plus en plus scrutée par les Occidentaux qui craignent que Pékin puisse ainsi accéder aux données d’utilisateurs du monde entier. Cette interdiction au sein du gouvernement fédéral américain survient quelques jours après une décision similaire de la Commission européenne, qui a interdit TikTok à son personnel pour “protéger” l’institution.

Le Parlement européen va interdire TikTok

Le Parlement européen a décidé à son tour d’interdire TikTok, application chinoise de partage de courtes vidéos, sur les téléphones professionnels de ses employés pour des raisons de sécurité, a-t-on appris mardi 28 février auprès d’un responsable de l’UE.

Cette interdiction s’appliquera aussi aux appareils mobiles personnels de ces employés sur lesquels sont installés un accès aux courriels du Parlement et d’autres accès au réseau, a précisé ce responsable, ajoutant que cette décision devrait être annoncée prochainement.

La Commission européenne et le Conseil européen ont déjà annoncé la semaine dernière une interdiction de TikTok sur les téléphones de leur personnel, de crainte que les autorités chinoises puissent se servir de cette application appartenant au groupe ByteDance pour récolter des données des utilisateurs et promouvoir leurs intérêts.

La Chine dément avoir de telles intentions. Des restrictions à l’utilisation de TikTok ont aussi été décidées aux Etats-Unis, au Canada et en Inde.

Le Parlement danois demande à ses députés et personnels de désinstaller TikTok

Le Parlement danois a annoncé mardi avoir demandé aux députés et à l’ensemble de ses personnels de bannir l’application TikTok des appareils mobiles qu’il fournit à cause du “risque d’espionnage”.

Cette annonce fait suite aux recommandations du Centre danois de cybersécurité conseillant fortement aux fonctionnaires de supprimer TikTok de leurs téléphones après l’interdiction par la Commission européenne de l’application sur les appareils professionnels pour “protéger” l’institution.

L’ultrapopulaire plateforme de vidéos, détenue par l’entreprise chinoise ByteDance, est de plus en plus scrutée par les Occidentaux qui craignent que Pékin puisse ainsi accéder aux données d’utilisateurs du monde entier. Le gouvernement du Canada a lui aussi annoncé lundi qu’il allait bannir TikTok des appareils mobiles qu’il fournit à son personnel à compter de mardi, évoquant “un niveau de risque inacceptable” pour la vie privée et la sécurité. TikTok fait déjà partie des applications chinoises interdites en Inde depuis 2020.

Accord parental obligatoire en France pour les moins de 15 ans

L’Assemblée nationale a voté jeudi l’obligation pour les réseaux sociaux comme TikTok ou Snapchat de vérifier l’accord des parents pour l’inscription des moins de 15 ans, l’un des maillons d’une série d’initiatives visant à encadrer les usages numériques des enfants.

La proposition de loi, portée par le patron des députés Horizons Laurent Marcangeli, a été adoptée à une quasi-unanimité (82 voix contre 2) en première lecture, dans un climat de concorde devenu rare au Palais Bourbon. Elle doit désormais être examinée au Sénat. Rejetant tout “discours moralisateur”, M. Marcangeli a défendu des “garde-fous indispensables” à poser face à “la précocité croissante de la puberté numérique et de la puissance des outils mis à disposition de nos jeunes”.

Pornographie, cyberharcèlement, standards de beauté inatteignables ou encore procédés addictifs pour capter l’attention: lors des débats, les députés se sont accordés sur la liste des risques face auxquels il fallait protéger les plus jeunes.

Commission d’enquête du Sénat

Il avait déjà été ciblé par les autorités américaines ; TikTok va maintenant passer sur le grill du parlement français. Le Sénat a décidé de créer une commission d’enquête sur le fonctionnement du réseau social chinois TikTok, a fait savoir jeudi 9 février le groupe politique Les Indépendants qui avait déposé une résolution en ce sens.

La commission d’enquête, validée mercredi par la conférence des présidents du Sénat, portera sur l’utilisation du réseau social TikTok, son exploitation des données et sa stratégie d’influence, a dit la cheffe de cabinet de Claude Malhuret, sénateur de l’Allier et président du groupe Les Indépendants. La commission d’enquête sera constituée après le 1er mars, jour où le Sénat désignera officiellement en séance publique ses 19 membres, a-t-elle précisé.

Le groupe politique Les Indépendants avait déposé le 1er février une résolution pour la création d’une commission d’enquête face aux accusations lancées contre TikTok, soupçonné d’espionnage et de violation de protection des données personnelles.

“Il y a un certain nombre d’accusations graves concernant ce réseau, sans compter que toute entreprise chinoise quelle qu’elle soit est obligée de collaborer avec les systèmes de renseignement chinois, a souligné en début de semaine Claude Malhuret sur Public Sénat. Par conséquent, ça me paraît tout à fait logique, tout à fait nécessaire, que le Sénat mène une commission d’enquête là-dessus”, a-t-il ajouté.

TikTok affirme chercher un “partenaire” en Europe

Face à la méfiance des pouvoirs publics européens, TikTok recherche un “partenaire” pour garantir que les données de ses utilisateurs ne sont pas transférées vers la Chine, sur le modèle des mesures prises aux Etats-Unis, a annoncé vendredi l’un des cadres du réseau social à l’AFP.

“Les gouvernements occidentaux ont de réelles inquiétudes au sujet de la Chine et, par conséquent, en tant qu’entreprise fondée par des Chinois, nous sommes davantage tenus de montrer comment nous sécurisons les données de nos utilisateurs”, a déclaré Theo Bertram, vice-président chargé des politiques publiques en Europe.

L’application très populaire de vidéos, propriété du géant ByteDance, souhaite donner des gages après la décision de la Commission européenne de bannir l’application sur les appareils professionnels de son personnel, invoquant des inquiétudes en matière de sécurité des données. Depuis, des mesures similaires ont notamment été prises par le Parlement européen et par le Parlement danois, tandis que la France réfléchit à une interdiction pour ses fonctionnaires.

Dans l’UE, ByteDance fait aussi l’objet d’une enquête de l’Autorité irlandaise de protection de la vie privée, qui le soupçonne d’enfreindre la législation européenne sur la protection des données (RGPD) en matière de traitement des données personnelles des enfants et de transferts de données vers la Chine.

TikTok souhaite donc répliquer le modèle mis en place aux Etats-Unis avec l’entreprise californienne Oracle, chargée depuis l’été 2022 d’héberger les données des utilisateurs dans le pays et d’auditer ses algorithmes. “Tout notre code est visible par Oracle. Nous ne pouvons pas faire de mise à jour sans passer par eux”, a souligné M. Bertram.

Si le projet, qui a déjà coûté 1,5 milliard de dollars à l’application, est approuvé par le Comité sur les investissements étrangers aux Etats-Unis (CFIUS), “Oracle enverra directement les mises à jour de l’application TikTok” sur les magasins d’application des téléphones portables, une “protection” qui bénéficiera aussi aux Européens car l’application “sera la même”, a-t-il précisé.

“Pour vraiment convaincre l’opinion publique, nous devons faire de même en Europe”, estime Theo Bertram. “Nous travaillons à créer trois nouveaux centres de données et nous travaillerons aussi avec un partenaire”, a-t-il ajouté, sans donner plus de détails à ce stade.

Source: challenges

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