Bois : le Cameroun augmente de 343% la taxe à l’exportation des grumes en 6 ans, pour doper la transformation locale

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Sur la période de 6 ans allant de 2017 à 2023, le gouvernement camerounais a procédé à une augmentation progressive du droit de sortie des grumes, passant d’un taux de 17,5% à 60%. Calculette en main, ces revalorisations successives, contenues dans les différentes lois des finances du pays, correspondent à une hausse globale de la taxation des exportations des grumes de 343% en valeur relative.

Selon les autorités camerounaises, cette surtaxation des grumes, décidée dans le sillage de la préparation de la décision des autorités de la Cemac (Cameroun, Congo, Gabon, Tchad, RCA, Tchad et Guinée équatoriale) d’interdire les exportations des grumes à compter du 1er janvier 2022, puis du 1er janvier 2023, puis finalement à une date non déterminée, vise simplement à encourager la transformation locale. Pour ce faire, depuis la loi des finances 2022, le pays a décidé d’exonérer de tous les droits et taxes de douane les appareils, équipements, matériels et outils importés destinés au développement de l’activité locale de « transformation poussée » du bois.

Dans le même temps, un droit d’accise ad valorem a été institué sur toutes les importations des ouvrages et mobiliers en bois. Cette mesure, qui vise à décourager les importations des produits finis issus de la transformation du bois, apprend-on des officiels camerounais, encourage plutôt les achats des meubles et autres mobiliers de bureau fabriqués localement. C’est dans cette optique que dans les circulaires relatives à la préparation des lois de finances 2023 et 2024, le chef de l’État, Paul Biya, prescrit expressément au gouvernement « la priorisation des meubles fabriqués localement dans la commande publique ».

Au demeurant, si toutes ces mesures enchantent les promoteurs des scieries et autres menuiseries industrielles au Cameroun, elles mettent plutôt en rogne les exploitants forestiers en activité dans le pays. En effet, dans une correspondance adressée au Premier ministre le 23 décembre 2022, le Groupement de la filière bois du Cameroun (GFBC), qui revendique 70% des exportations de bois du pays, dénonce un « étranglement fiscal », avec un préavis de grève en prime.

Chômage technique

« Excellence monsieur le Premier ministre, si rien n’est fait dans le sens de la préservation de notre filière, nous courrons tout droit vers un déluge qui mettra en péril les investissements colossaux de nos entreprises, et nous serons malheureusement obligés à partir du 2 janvier 2023, à observer un mouvement de grève, qui se manifestera de prime à bord par la suspension des déclarations en douane et se poursuivra par une mise en congé technique du personnel en entreprise. Car, nous sommes à ce jour fiscalement étranglés », peut-on lire dans la correspondance du GFBC.

Face à cette sortie des exploitants forestiers, le gouvernement fera la sourde oreille. Et la menace de grève proférée par le GFBC ne prospérera pas non plus. Puisque les exportations de bois en grumes (droit de sortie de 60%) et débités (droit de sortie de 15%) se sont poursuivies depuis janvier 2023. Selon le rapport sur les comptes nationaux du premier trimestre 2023, publié par l’Institut national de la statistique (INS), la branche « sylviculture et exploitation forestière » a contribué à hauteur de 227 milliards de FCFA au PIB du Cameroun, soit 0,5% du global. Cependant, révèle l’INS, il s’agit de la plus mauvaise performance de ce secteur depuis le 4e trimestre 2021.

Si les exportations de bois n’ont pas été suspendues au Cameroun malgré la menace des forestiers, certaines sociétés forestières ont cependant dû suspendre nombre de contrats de travail des employés, face à ce qu’ils considèrent comme « un étranglement fiscal ». « Par suite des dernières augmentations de taxes contenues dans la loi de finances 2023, des actions entreprises par l’administration des douanes en vue de revoir à la hausse les valeurs imposables servant de base de taxation, et au silence observé par le gouvernement depuis notre préavis de suspension des opérations douanières, la direction générale, en solidarité avec le Groupement de la filière bois du Cameroun (GFBC), décide, jusqu’à nouvel ordre, de la mise en chômage technique de l’ensemble du personnel, à compter du 13 janvier 2023 », peut-on lire dans une note de service signée le 11 janvier 2023 par Marc Sarraute, directeur administratif et financier de la Fabrique camerounaise de parquets (Fipcam). Il s’agit d’une entreprise à capitaux italiens opérant au Cameroun depuis 2001 dans l’exploitation forestière et le sciage. Cette société forestière revendiquait 662 employés en 2015.

Source: Investir au Cameroun

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