L’Afrique veut jouer la carte du tourisme

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Ces chiffres font rêver l’Afrique… 10 % du PIB mondial, 7 % du commerce international et 30 % des exportations de services… Le tourisme est une manne. A l’heure où le nombre de voyageurs bondit d’année en année de plusieurs pourcents, le continent aimerait récupérer sa part du dividende touristique pour accélérer son développement. D’autant qu’il doit fournir du travail à ses jeunes et que, dans le monde, un emploi sur 11 est directement lié à ce secteur. Si l’île Maurice ou le Cap-Vert jouent de longue date cette carte, une longue liste de nations subsahariennes aimerait tenter l’aventure. Début octobre, ils ont fait le déplacement au Parc des expositions à la porte de Versailles pour participer au traditionnel Rendez-vous des professionnels du tourisme.

La nouveauté de ces dernières années reste l’Ethiopie, où plus de 900 000 voyageurs ont posé leurs bagages en 2017. Pascal Leduc, qui dirige une agence de voyage francophone implantée à Addis-Abeba depuis 2009, a désormais pour « but de faire découvrir le riche patrimoine culturel et historique de l’Ethiopie à des touristes majoritairement africains et français ». Suivant de près l’évolution du pays, il porte un regard optimiste sur son avenir touristique : « C’est un secteur vital pour l’économie, estime-t-il. En créant des emplois et en faisant rentrer des devises, il permet à une partie de sa population de mieux gagner sa vie, dans un pays où les salaires sont bien souvent encore très faibles. » Parcourant l’Ethiopie depuis trois décennies, il souligne les efforts du gouvernement pour faire décoller ce secteur et observe qu’« en l’espace d’à peine vingt ans, les progrès en matière de construction d’infrastructures ont été impressionnants. Au point que, désormais, le parc hôtelier est considérable. » Un atout de taille qui s’ajoute à la richesse culturelle de ce pays de l’est du continent.

Planche de salut

Si côté Afrique de l’Ouest, le Sénégal a une longueur d’avance sur nombre de ses voisins, il veut encore croire dans son potentiel de croissance. Ce secteur emploie déjà 150 000 Sénégalais, comme le rappelle Alioune Sarr, le ministre du tourisme et des transports aériens. En 2017, plus de 1,3 million de touristes y a passé du temps, en majorité des Européens, dont beaucoup de Français. Le Plan Sénégal Emergent, lancé en 2014 par le président Macky Sall, projetait de faire de ce secteur un levier actif du développement et d’y multiplier par quatre le nombre d’emplois. Le pays se rêve en destination balnéaire ou en espace d’écotourisme, centré sur la découverte d’espaces naturels.

Seul bémol : la question de la réciprocité des visas de tourisme. De nombreuses voix se font régulièrement entendre dans la société sénégalaise pour que Dakar impose la même politique restrictive de visas aux ressortissants étrangers provenant des pays qui l’appliquent, dont la France. En matière de tourisme, ce serait se tirer une balle dans le pied. Le pays, qui avait déjà mis en place une telle mesure en 2013, avait dû se résoudre à l’abandonner en 2015 face à la pression des professionnels du secteur. Un débat lancinant que le président Macky Sall n’a pas encore définitivement tranché.

A 1 800 km à l’est, mais seulement à quelques mètres du stand sénégalais, le Togo a choisi, lui, de tout miser sur le tourisme vert. A la différence du Sénégal, il souffre d’un manque de visibilité sur la scène touristique, mais a tout de même attiré près de 500 000 visiteurs en 2017, selon un baromètre de l’Organisation mondiale du tourisme. Le pays veut plaire à un public européen, amateur d’espaces naturels sauvages et de safaris. « Le Togo est riche en lacs, en cascades et en parcs animaliers », détaille un représentant de l’Office togolais du tourisme. « Nous développons des offres de tourisme sportif en lien avec les différents milieux naturels du pays », ajoute-t-il, citant la pratique de la randonnée, de la descente en pirogue, de la planche à voile… Conscient que la tâche est encore rude pour faire du Togo une destination de choix en Afrique de l’Ouest, il se dit cependant confiant et constate une « nette progression » du nombre de visiteurs en 2017 avec près de 47 % de plus que l’année précédente.

« Gagner en visibilité »

Le chemin semble encore long pour de petits Etats, comme la Guinée-Bissau ou la Sierra Leone qui tentent eux aussi de se faire une place dans les catalogues des voyagistes. Minée par une violente guerre civile en 1998-1999, des coups d’Etat ou des tentatives de putsch incessantes, une économie gangrenée par le narcotrafic, la Guinée-Bissau espère avoir trouvé sa planche de salut dans le tourisme. C’est en tout cas l’avis des représentants, déterminés, de l’Office du tourisme de ce petit pays lusophone situé juste sous la Casamance sénégalaise. Peu de monde se bousculait pourtant sur leur stand au parc de Versailles. Très loin des millions de visiteurs annuels avides du soleil marocain, environ 40 000 touristes ont tenté l’aventure en Guinée Bissau en 2015, selon des chiffres de la Banque mondiale.

Peu importe, Carla Maria, la directrice de la communication du tourisme ne se démonte pas. « Un carnaval avec des musiciens locaux est organisé dans la capitale au mois de février ou mars. L’ambiance y est très festive ! ». Pour elle, la Guinée-Bissau a un « grand potentiel touristique avec une belle diversité de faune sauvage, des longues plages de sable blanc, des mangroves ». « L’archipel des Bijagos offre des paysages magnifiques ! », ajoute-t-elle, avant de concéder avoir quand même « besoin d’investissements étrangers pour développer le tourisme et gagner en visibilité ».

Reste, pour le continent, à surmonter le choc provoqué par la faillite, fin septembre, de la compagnie aérienne Aigle Azur, spécialisée dans la desserte de pays méditerranéens, et surtout du voyagiste Thomas Cook. Le groupe commercialisait plus de 1 800 voyages sur le continent, selon son site Internet. En Gambie par exemple, pendant la haute saison, près de la moitié des touristes arrivaient via Thomas Cook, selon le gouvernement.

Source; Le Monde.fr

 

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