Le marché des paiements électroniques domestiques offre de belles perspectives de croissance en Afrique, où 5 à 7% seulement des transactions passent par des canaux numériques. Bien que les fintechs y apparaissent comme de véritables « game changers », les banques et les opérateurs ont du répondant.
Les revenus des divers acteurs du marché des paiements électroniques domestiques en Afrique devraient enregistrer une croissance de 20% par an durant les trois prochaines années pour atteindre 40 milliards de dollars en 2025, a estimé le cabinet de conseil en stratégie McKinsey & Co dans un rapport publié le 7 septembre 2022.
Ce taux est environ trois fois plus élevé que celui des revenus des acteurs du marché des paiements électroniques nationaux (hors paiements transfrontaliers) à l’échelle mondiale, qui devrait se limiter à 7% par an, a-t-on précisé de même source.
Intitulé « L’avenir des paiements en Afrique » (The future of payments in Africa), le rapport précise également que les acteurs du secteur sur le continent (banques, opérateurs télécoms, fintech, sociétés de transfert d’argent) ont engrangé 24 milliards de dollars de revenus en 2020, dont 15 milliards de dollars provenant des paiements électroniques domestiques.
Les revenus issus des paiements électroniques domestiques ont été générés par 47 milliards de transactions d’une valeur globale de plus de 800 milliards de dollars.
En Afrique comme ailleurs, les paiements mobiles ont bénéficié des vents porteurs liés aux restrictions sanitaires imposées lors de la pandémie de Covid-19. Ainsi, le Nigeria a par exemple enregistré un record de 800 millions de transactions de mobile money en 2020 alors que les achats en ligne ont connu une croissance de 40% en Afrique du Sud durant les confinements décrétés par les autorités en 2020 et 2021.
Malgré cette forte croissance, le marché des paiements électroniques offre d’énormes marges de progression sur un continent où le cash est encore roi. Seulement 5 à 7 % du total des paiements réalisés en Afrique passent par des canaux numériques, contre plus de 50 % en Turquie par exemple.
Cinq marchés très prometteurs
Les gisements de croissance sont cependant inégalement répartis entre les pays africains.
McKinsey estime que cinq pays du continent, qui ont opéré une transition digitale plus rapidement que les autres, offrent les meilleures perspectives de croissance. Il s’agit de l’Egypte, du Ghana, du Kenya, du Nigeria et de l’Afrique du Sud. « Il est probable qu’environ 50% des revenus des acteurs du marché des paiements électroniques au cours des prochaines années proviennent de ces cinq pays », souligne le cabinet, estimant que la croissance la plus rapide devrait être enregistrée au Nigeria (35 % par an).
Les acteurs du paiement électronique opérant au Sénégal, en Côte d’Ivoire et en Ouganda devraient également connaître une forte croissance de leurs revenus dans les années à venir.
Le rapport souligne d’autre part que la croissance démographique et l’urbanisation galopante seront les principaux moteurs de la croissance attendue du secteur sur le continent.
L’Afrique enregistre en effet le taux de croissance démographique le plus rapide au monde (2,7 % par an contre une moyenne mondiale de 1 %), alors que l’âge médian de la population africaine n’est que de 20 ans. A l’horizon 2045, plus des deux tiers devraient vivre dans les villes.
Les consommateurs en Afrique continuent aussi à bénéficier de méthodes de paiement électronique alternatives. Outre les comptes de mobile money, dont le nombre a atteint 1,2 milliard en 2020, de nouvelles technologies permettent de faciliter les transactions, comme les codes QR intégrés et les cryptomonnaies, y compris celles lancées par des Banques centrales.
Le système panafricain de paiement et de règlement (PAPSS), qui permet d’effectuer des paiements transfrontaliers instantanés en monnaies locales entre les pays africains, représente aussi une évolution majeure.
Un mouvement de consolidation en vue
S’agissant des opportunités qu’offre le marché des paiements électroniques aux différents acteurs, McKinsey & Co pense que les fintechs occuperont une place plus prépondérante grâce à leurs solutions technologiques innovantes. Les consommateurs sont déjà passés des comptes de mobile money de base offrant des services de transferts d’argent de pair à pair (P2P) à des portefeuilles électroniques offrant des services financiers plus complets, dont le paiement des factures, le paiement des achats, l’épargne, les prêts et les produits d’assurance.
Les fintechs stimulent également l’adoption du paiement électronique par les petites et moyennes entreprises (PME). L’Afrique compte en effet environ 90 millions de PME, dont environ 80 % sont des entreprises informelles qui sont délaissées par les banques pour des raisons réglementaires ou des considérations liées aux coûts opérationnels.
Le rapport fait aussi remarquer que le marché des paiements électroniques recèle encore des opportunités pour les banques africaines puisque les cartes de paiement demeurent l’un des canaux les plus privilégiés, en raison notamment de leur forte pénétration sur des marchés clés comme l’Egypte, le Maroc et l’Afrique du Sud.
Les banques pourraient aussi intégrer des prêts et d’autres produits sur des plateformes tierces comme les portefeuilles électroniques et les sites de e-commerce pour étendre la portée de la distribution bien au-delà des personnes possédant un compte bancaire.
En raison de leurs grandes bases de clients et de l’étendue de leurs réseaux d’agents, les opérateurs télécoms disposent, quant à eux, d’un avantage préférentiel dans le domaine des paiements électroniques qu’ils pourraient exploiter de façon optimale en investissant dans l’innovation, y compris l’amélioration des offres actuelles, la monétisation des données clients, l’amélioration de l’expérience utilisateur et l’encouragement de la migration des grandes bases de clients hors ligne vers les canaux en ligne.
Au regard de la multitude des acteurs opérant sur le marché des paiements électroniques en Afrique, McKinsey & Co anticipe un mouvement de consolidation, qui passera par des rachats ainsi que des opérations de fusions-absorptions destinées à réaliser des économies d’échelle.
Source : Agence Ecofin
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