Telecom- Concurrence entre Orange et Wave : Le malheur des prestataires fait le bonheur des populations

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A l’angle d’une ruelle de cette cité jouxtant les deux voies de Liberté 6, un kiosque peint en rouge attire beaucoup de clients. Sur la devanture, des affiches portant les logos de Wave et d’Orange, deux de chaque côté, donnent une idée précise de l’activité qui se mène sur les lieux. A tour de rôle, des clients de tout âge font leurs transactions. « Envoi ou retrait… », demande Aminata Fall, la gérante. La discussion est lancée. La cliente de répliquer : « retrait Wave ». Ce genre d’échange meuble le quotidien de la dame, la trentaine révolue. Le constat immédiat est que la demande est plus forte du côté de Wave que de son principal concurrent Orange. A la question de savoir ce qui explique cette situation, une jeune fille, la vingtaine, venue pour un retrait, lance sans hésiter : « Wave est le service parfait. En plus, les tarifs sont moins chers ».

Un avis partagé par Moussa Diop, un étudiant rencontré sur place. A l’en croire, Wave a complètement bouleversé le marché des transferts. Il note que les consommateurs en voulaient à Orange pour la cherté de ses services. « Wave est la solution. Il faut toujours une concurrence pour pouvoir réguler les choses. Orange a désormais un concurrent sérieux. Et personne ne peut dire que c’est une mauvaise chose », affirme le sieur Diop.

Aminata Fall dit tout le contraire. Elle estime que même si les clients sont satisfaits et que les deux opérateurs y ont bien leurs comptes, ce n’est pas le cas des prestataires. « Avant, on gagnait beaucoup d’argent avec Orange, mais c’est un peu compliqué maintenant. Les commissions sont très faibles et quand on n’a pas d’autre alternative, on ne peut que faire avec. Chez Wave, par exemple, il faut 1 million de FCFA de transactions pour gagner 5 800 FCFA. On peut gagner moins que ça. Pour chaque montant, il y a un barème. Les commissions d’Orange sont plus importantes, mais avec la baisse de leurs tarifs, ce n’est pas du tout facile pour nous. En plus, la plupart des clients sollicitent les services de Wave », regrette Aminata Fall.

Cette situation n’a pas tardé à faire réagir ces attributaires du secteur. Ibrahima Khalil Ndiaye, coordonnateur du Réseau national des prestataires de transferts d’argent (Renapta), accuse le géant français d’être à l’origine de cette situation. Dans un communiqué publié sur la page officielle Facebook de l’organisation, M. Ndiaye parle d’arnaque. « Depuis quelques jours, Orange Money, avec l’énième révision de son modèle de commissionnement qu’il a imposé sans aucune concertation, a encore agrandi le fossé qui le sépare des prestataires et augmenté l’incrédulité des clients perdus dans ce tourbillon qui ne s’arrête plus. Nous avons reçu de nombreuses complaintes des prestataires qui constatent avec amertume les coupes sombres opérées sur le commissionnement. Orange Money a, d’une façon unilatérale, décidé de passer au commissionnement hebdomadaire. Les prestataires, dans leur quasi-totalité, ont été délestés de leurs gains pour des supposées pratiques frauduleuses que les services d’Orange peinent à expliquer », sérine-t-il.

Orange Money en difficulté, 5 000 distributeurs en font les frais

Dans cette guéguerre entre prestataires et Orange, Wave continue de gagner du terrain chez les clients. D’ailleurs, Orange Finance Mobile impute toute la responsabilité à la fintech américaine. Dans un entretien accordé à nos confrères de Jeune Afrique, Cheikh Tidiane Sarr, DG de ce département d’Orange, avançait que l’arrivée de la start-up américaine a bousculé l’équilibre de l’écosystème construit par Sonatel depuis douze ans. « Avec Wave, l’équilibre des prix a été brutalement rompu. Aujourd’hui, nous n’avons quasiment pas de revenu sur cette activité », renseigne-t-il.

Il reconnaît toutefois que cette situation n’est pas sans conséquences pour tout le monde, y compris les prestataires. Ces derniers se trouveraient dans une mauvaise passe. Cheikh Tidiane Sarr relève également que les pertes enregistrées ont un impact au plan social : « en l’espace de six mois, 5 000 distributeurs ont déjà disparu à cause d’une baisse des prix déséquilibrée, sur un total de 45 000. Vingt-mille d’entre eux déclarent rencontrer de sérieuses difficultés, et certains en viennent à facturer illégalement les dépôts, car il s’agit pour eux d’une question de survie. Cela n’avait jamais existé jusque-là, et nous négocions avec eux pour les ramener à la raison. Car tout cela se fait aussi au détriment des clients ».

Les populations indifférentes à cette situation

Cette négociation avec les distributeurs, évoquée par le Directeur Cheikh Tidiane Sarr, n’est pas partagée par Khalil Ndiaye qui, dans le communiqué du Reanapta, affirme avec regret : « ils (Orange ndlr) font preuve d’arrogance, de prépotence comme ils nous ont habitués à le faire, rejoignant Wave sur le terrain de l’intimidation et de la désinformation. Les prestataires prennent à témoin l’opinion et les autorités face à ce qui ne fait que renforcer cette situation délétère qui prévaut depuis le mois de juin ». Cette difficulté ne semble pas perturber la quiétude des populations qui se trouvent soulagées.

Dans une agence multiservice au marché de Yoff, l’ambiance est bon enfant en cette matinée du mois de décembre. Clients et gérants discutent des questions d’actualité. Venue faire photocopier des documents, Fatou Sylla prie pour que la concurrence continue, car c’est au grand bonheur des populations. Elle estime que c’est grâce à Wave qu’Orange a dû diminuer ses frais. Le gérant des lieux ne semble pas être convaincu par les propos de sa cliente. Mouhamed Faye, la trentaine, est dans ce secteur depuis bientôt 4 ans. Cet état de fait est inédit et que ce sont eux les prestataires qui vont en pâtir, révèle-t-Il, avant de se tourner vers un client qui vient faire un dépôt sur son compte Orange Money. Seulement, ce dernier est surpris qu’on lui demande des frais de service qui s’élèvent à 50 francs. Fatou Sylla de s’en mêler : « ce n’est pas de l’arnaque, le fait de demander des frais de service à un client ?»

 

SOURCE : social Netlink

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