Alibaba mis au pas : la méthode chinoise pour réguler les géants du Net

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En Chine, on a coutume de dire qu’entre Alibaba et Tencent, il faut choisir. Et se retrouver enfermé dans leur écosystème encore plus concentré qu’en Occident. Ainsi, Alibaba, c’est une place de marché en situation de monopole, un géant du paiement en ligne et mobile, une domination sur la livraison à domicile, tant de repas que de colis, des taxis, de la surveillance en ligne, la première plateforme de vidéos de Chine, une major du cinéma local…

L’explosion des crédits à la consommation

Quant au géant Tencent, qui concurrence son rival dans le domaine du paiement en ligne, il a choisi d’asseoir son monopole sur les réseaux sociaux et le divertissement, et marche aussi sur les plates-bandes de Google avec un navigateur Internet, un moteur de recherche et un service mail dominant dans le pays.

L’explosion des crédits à la consommation en ligne pour acheter sur les plateformes Alibaba, fournis, payés et assurés par les services bancaires du groupe, a sifflé la fin de la récréation pour l’entreprise, jusqu’ici dans les bonnes grâces du pouvoir. Tandis qu’il était traité de « vampire » et de « parasite financier » en Chine, le charismatique PDG du groupe Jack Ma – ou plutôt Ma Yun de son vrai nom – se forgeait à l’international un portrait de « self-made man », d’entrepreneur digne de la Silicon Valley et accumulait une fortune digne de celle de ses homologues californiens.

Condamnés au titre de la loi anti-monopoles

Le 11 décembre 2020, le bureau politique du Parti communiste chinois dénonçait « l’expansion désordonnée du capital ». Le 14, les deux géants sont condamnés à des amendes au titre de la loi anti-monopoles. Quelques jours plus tard, c’est la banque centrale du pays qui interdisait l’entrée en Bourse d’Ant, société sœur chargée des opérations financières et bancaires d’Alibaba, qui espérait lever l’équivalent de 30 milliards d’euros. Le président de l’autorité a cité, parmi les raisons de cette interdiction, « le mépris des exigences de conformité réglementaire, la tricherie, l’exploitation de sa position dominante sur le marché pour exclure les concurrents et l’atteinte aux droits et intérêts légitimes des consommateurs ».

L’éducation idéologique des patrons

Il a aussi ordonné au groupe de mettre fin à ce qu’elle considère comme une dérive monopolistique, et de revenir strictement à l’activité d’origine d’Ant, à savoir un service de paiement en ligne. En parallèle, les autorités de la concurrence s’en sont prises à Alibaba, qui oblige les vendeurs tiers qui souhaitent proposer leurs produits sur ses places de marché à s’engager à ne pas les vendre ailleurs. « C’est une mesure importante pour notre pays afin de renforcer la supervision antimonopolistique dans le secteur de l’Internet et promouvoir un développement sain à long terme de l’économie numérique », s’est réjoui le Quotidien du peuple. Convoqué par les superviseurs financiers chinois, Jack Ma n’a plus été vu en public depuis plus de deux mois. Selon l’agence Bloomberg, il aurait reçu l’ordre de ne pas quitter le territoire.

Cette volonté d’en finir avec ces dérives est plus large. Le pouvoir a clairement affiché son intention de remettre le PCC au cœur de l’économie. « Unifiez les membres du secteur privé autour du parti, et améliorez la promotion du développement sain de l’économie de marché », ordonnait ainsi, fin septembre, le président chinois, cité par le Quotidien du peuple. Xi Jinping a insisté aussi sur l’importance de l’éducation idéologique et politique des patrons.

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