Qui sera couronné le 23 octobre comme le successeur du jeune cinéaste rwandais Joël Karakezi qui avait remporté en 2019 la distinction suprême, l’Étalon d’or de Yennenga ? Pour l’ouverture du Fespaco 2021, il y aura ce samedi au Palais des sports de Ouagadougou d’abord un spectacle dédié à la princesse Amazone Yennenga, chorégraphié par le Burkinabè Serge Aimé Coulibaly comme un hymne à la résistance contre les fléaux de la pandémie et du terrorisme. Le fait d’avoir monté aussi des écrans en plein air dans la capitale burkinabè, montre également la détermination des autorités.
Le Sénégal, pays d’honneur et emblématique de cette 27e édition
Le film d’ouverture Atlantique symbolise en quelque sorte le sacre de la cinéaste franco-sénégalaise Mati Diop, première réalisatrice d’origine africaine distinguée au Festival de Cannes avec le prix du Jury. Le Sénégal est d’ailleurs le pays d’honneur et emblématique de cette 27e édition à la fois à la recherche de ses racines et à la conquête de nouveaux horizons panafricains. Le réalisateur Alain Gomis, lauréat de l’Étalon d’or en 2013 et 2017, sera honoré à Ouagadougou d’une statue dans la même avenue des cinéastes où se trouve déjà la sculpture de son compatriote légendaire Ousmane Sembène. Ce dernier avait réalisé en 1962 Borom Sarret, l’un des premiers films africains tournés en Afrique. Quant à Alain Gomis, il entretient désormais la flamme du cinéma avec son Centre Yennenga à Dakar où il forme de jeunes réalisateurs africains pour construire petit à petit l’autonomie cinématographique en Afrique. Et Mamadou Dia, lauréat du Léopard d’or, est en lice, avec Le père de Nafi, pour l’Étalon d’or 2021, sous l’œil attentif du cinéaste mauritanien Abderrahmane Sissako, président du jury.
La force de la diversité africaine
Pour assurer dans la compétition la présence de réalisateurs d’un maximum de pays africains, le nouveau directeur général du Fespaco, Alex Moussa Sawadogo, a joué la carte de la diversité. La catégorie reine de la compétition affiche 17 fictions longs métrages de 15 pays différents, seul l’Égypte assure deux films sur la liste. Le Mali est pour la première fois absent de la compétition des fictions. Les festivaliers attendent de vraies découvertes cinématographiques de tout le continent. Parmi les heureux élus se trouve par exemple This is not a burial, it’s a resurrection, déjà primé par le Prix spécial du jury au festival Sundance, réalisé par Lemohang Jeremiah Mosese de Lesotho, un pays de 2,3 millions d’habitants où il n’y a pas de salles de cinéma, seulement quatre cinémas itinérants, et où seulement « dix personnes vivent actuellement de la réalisation de films dans le pays », selon un rapport de l’Unesco.
Autre pays souvent vu au cinéma comme lieu très prisé de tournage et pour ses décors, mais souvent absent de la carte mondiale des réalisateurs, la Namibie, représentée par la réalisatrice Desiree Kahikopo-Meiffret et son film The White Line. Une dizaine de films locaux sont tournés chaque année en Namibie et projetés sur les seize écrans de cinéma des grandes villes. Ahmed Khadar portera avec son film très poétique et touchant, La femme du fossoyeur, l’honneur de la Somalie, pays de 15 millions habitants doté de huit cinémas.
Un troisième Étalon d’or pour le Burkina Faso ?
Les cinéphiles du Burkina Faso, le pays hôte du festival, espèrent que l’Étalon d’or sera remporté pour la troisième fois par un réalisateur burkinabè. Après Idrissa Ouedraogo en 1991, avec Tilaï, et Gaston Kaboré en 1997, avec Buud Yam, les regards se tournent vers Boubacar Diallo et son film Les trois Lascars.
Cette édition 2021 aura lieu à un moment critique pour le cinéma et pour le pays. Depuis des années, le Burkina Faso fait face à la recrudescence des attaques terroristes. Et le plus grand festival de cinéma en Afrique se déroulera dans une période où les plateformes américaines sont visiblement décidées de conquérir le continent africain. Depuis 1969, le Burkina, pays de 27 millions d’habitants, a fièrement soutenu le plus grand festival de cinéma en Afrique, néanmoins, aujourd’hui, le résultat pour l’industrie cinématographique et audiovisuelle du pays semble assez modeste. Le cinéma Guimbi à Bobo-Dioulasso, la deuxième ville du pays, sera après son ouverture prévue en octobre une des huit salles fonctionnant de manière régulière. Selon les chiffres communiqués par le ministère de la Culture burkinabè, une quarantaine de films locaux sont produits en moyenne chaque année dans le pays des hommes intègres. Le secteur du cinéma et de l’audiovisuel assure actuellement 2 000 emplois directs et 6 000 emplois indirects. Les revenus générés par le secteur sont estimés à 2 millions de dollars.
Entre la fierté nationale, la force panafricaine et la révolution numérique
L’enjeu pour le festival 2021 et pour son nouveau directeur général, Alex Moussa Sawadogo, s’avère donc énorme. Comment entretenir à la fois la fierté nationale pour le Fespaco et promouvoir la qualité et la diversité des films africains ? En même temps, il s’agit de relever le défi d’embrasser la rupture provoquée par la révolution numérique avec une offre de films et de séries (car c’est bien aussi le Festival panafricain de la télévision avec son Marché international du cinéma africain) aussi adaptés pour les plateformes. Tout cela dans un pays où seulement 16% de la population sont considérés comme usagers d’Internet et seulement 32% des abonnés mobiles disposent d’un accès à Internet via leur mobile.
En attendant, la capitale du cinéma africain nous donne rendez-vous pour vivre avec joie la 27e édition du Fespaco jusqu’au palmarès, annoncé le 23 octobre. Vive le cinéma !
Source: RFI
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