En Côte d’Ivoire, plus gros PIB d’Afrique francophone, le commerce en ligne séduit de plus en plus de commerçants par son accessibilité. Les prévisions pour ce marché – estimé à plus de 30 milliards de francs CFA – sont assez optimistes. Mais en réalité, le e-commerce souffre toujours du faible taux de bancarisation, des frais élevés de transfert d’argent et des restrictions que les plateformes mondiales de paiement en ligne comme PayPal imposent aux utilisateurs ivoiriens.
Vanessa est une commerçante qui ne paye ni local ni employé. Cela fait près de dix ans que l’entrepreneure vend en ligne ses produits cosmétiques à base de beurre de cacao et de karité. Le tout depuis sa résidence de Bouaké, une des plus grandes villes ivoiriennes, située dans le centre du pays. Cette vendeuse dépend exclusivement de ce commerce. Elle a des clients en Côte d’Ivoire, en France et au Canada mais elle se retrouve confrontée à des problèmes de transactions et de frais qui affectent ses profits.
“En Côte d’Ivoire, la plupart de mes clients n’ont pas de carte bancaire. Ils paient par Orange Money, Wave, MTN et autres portefeuilles mobiles mais cela engendre des frais. Ça peut vite coûter cher et les freiner dans leur achat, déplore-t-elle. Pour mes clients à l’étranger, c’est encore pire. Il faut qu’ils se déplacent pour m’envoyer de l’argent par Western Union, Ria ou MoneyGram, avec des frais qui peuvent atteindre 2 %.”
Kader Diaby, créateur d’une marque de vêtements en ligne à base de matériaux organiques, fait le même constat. Son commerce en ligne constitue 30 % de ses revenus mensuels, notamment grâce à des clients au Nigeria, en Afrique du Sud et en France. Un chiffre qui pourrait être revu à la hausse s’il bénéficiait d’un accès à PayPal, un des leaders du paiement en ligne dans le monde.
Retrait d’argent impossible avec PayPal
Depuis 2014, PayPal permet aux consommateurs ivoiriens dotés d’une carte bancaire de faire des achats en ligne. Mais le service s’avère inutile pour les comptes de commerçants car ceux-ci n’ont pas la possibilité de recevoir de l’argent sur la plateforme. Cet accès limité s’explique par les risques de cybercriminalité qui ont pris de l’ampleur dans les années 2000. En cause : le phénomène des brouteurs – des pros de l’arnaque sur Internet qui ciblent principalement l’Europe.
“Je trouve ça discriminant”, s’indigne Mory, un entrepreneur qui propose des services en ligne à des artistes. “Ça nous oblige à créer des comptes qu’on domicilie au Maroc ou ailleurs. Et lorsque PayPal se rend compte de la supercherie, il bloque nos comptes et notre argent avec.” Mais le jeune Abidjanais n’a pas d’autre choix que d’accepter les règlements par le biais de l’entreprise américaine s’il ne veut pas perdre de clients.
Solutions locales
Selon une étude de McKinsey & Company, l’e-commerce pourrait représenter 10 % des ventes au détail des plus grandes économies africaines d’ici 2025. En Côte d’Ivoire, ce secteur contribue déjà à plus de 9 % du PIB, rappelle l’économiste ivoirien Yao Séraphin Prao.
Le résumé de la semaineFrance 24 vous propose de revenir sur potentiel de ce marché, Idriss Marcial Monthe a cofondé CinetPay en 2016 : une plateforme de paiement et de transfert d’argent qui fonctionne sans carte bancaire.
“Avant, j’avais une entreprise en ligne de vente de noms de domaine Internet et je me déplaçais pour aller chercher les paiements chez mes clients. Le coût du transport plus les embouteillages, ça n’était pas viable. On a alors décidé d’intégrer sur notre site les trois opérateurs de paiement mobile en Côte d’Ivoire pour permettre à nos clients de nous payer”, se souvient l’homme d’affaires. C’est ainsi que la solution à son problème est aujourd’hui devenue une solution qui facilite le quotidien des e-commerçants dans une dizaine de pays d’Afrique francophone.
Pour le président de CinetPay, développement et sécurité vont de pair. “La lutte contre la cybercriminalité menée par les autorités ivoiriennes pourrait ouvrir la voie à des innovations qui révolutionneront le secteur du e-commerce en Côte d’Ivoire”, explique-t-il à France 24.
Miser sur la bancarisation
Comment révolutionner le secteur du e-commerce lorsque à peine 20 % de la population a un compte bancaire ? Avec des réformes structurelles du système bancaire et une solide collaboration entre l’État et des structures comme Visa, MasterCard et PayPal, répond l’économiste Yao Séraphin Prao.
Des arguments partagés par Daniel Ahouassa, cofondateur d’APaym, une application qui permet aux commerçants d’accepter tous types de paiements bancaires. Lors du Forum ivoirien du digital (FID) qui s’est tenu à Abidjan du 2 au 3 septembre, il a appelé les acteurs des télécommunications à s’emparer de ce marché. “Il faut que nous travaillions avec les banques pour développer les moyens de paiement électroniques et sensibiliser la population. Il faut rendre ça fiable et accessible”, a-t-il déclaré à France 24 lors de l’événement. En attendant que toutes ces réformes aboutissent, ce sont les commerçants qui font les frais d’un manque de solutions de paiement en ligne fiables en Côte d’Ivoire.
Source : France 24
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