Facebook -Economie Numérique : comprendre la dégringolade de l’empire en 5 questions

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Comment le réseau social phare des années 2000 et 2010 est-il devenu l’homme malade de la tech américaine ? Constat, raisons et perspectives, on vous explique tout sur la perte d’hégémonie de Meta, la maison mère de Facebook.

Pourquoi parle-t-on d’empire ?

Meta, c’est le regroupement de trois noms emblématiques du XXIe siècle : Facebook, Instagram et WhatsApp. L’ensemble pèse 304 milliards de dollars en bourse. Si ce chiffre ne vous parle pas, c’est deux fois la valorisation du pétrolier français TotalEnergies et sept fois celle de Stellantis, le groupe automobile qui rassemble les marques Peugeot, Citroën, Fiat et Chrysler.

Avant la crise qu’il traverse, Meta comptait 87.000 salariés, des effectifs qui ont presque triplé sur les quatre dernières années. L’entreprise est devenue l’un des symboles de la tech américaine. Elle a d’ailleurs donné sa lettre aux fameux Gafa, aux côtés de Google, Apple et Amazon.

A quoi observe-t-on son déclin ?

On a évoqué sa capitalisation boursière, revenons-y. Elle a chuté de 70 % depuis son pic atteint en août 2021. La presse parlait alors à grand titre de Meta comme cette autre entreprise valorisée à plus de 1.000 milliards de dollars.

Cours de l'action Meta jusqu'au 13 décembre.

Cours de l’action Meta jusqu’au 13 décembre.DR

Autre témoin de cette chute : son chiffre d’affaires. Au troisième trimestre 2022, il a baissé de 4 %. Son bénéfice net, lui, a été divisé par deux.

Dans la foulée, Mark Zuckerberg n’a pas hésité à réduire la voilure. En novembre dernier, il a annoncé 11.000 licenciements sur les 87.000, soit une baisse notable de 13 % des effectifs.

Quelles sont les raisons de cette déroute ?

Fin du far west des cookies

La baisse des recettes s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, la réglementation. Depuis plusieurs années, la tendance est à l’encadrement du ciblage publicitaire. Autrement dit, c’est la fin du far west sur le digital. L’Union européenne (rappelons-le, première puissance commerciale du monde) s’est dotée du RGPD, qui interdit aux entreprises d’obliger les utilisateurs à fournir des informations personnelles sauf si cela est nécessaire pour utiliser les services, ainsi que de la directive ePrivacy qui oblige à faire consentir les internautes avant de se faire tracer par des cookies.

Autre obstacle : l’App Tracking Transparency. Ce nom ne vous dit peut-être rien, pourtant l’ATT est synonyme de bing bang pour les entreprises qui vendent de la publicité en ligne, au premier rang desquels Facebook et Instagram. L’ATT est le nom du système d’Apple qui introduit une obligation pour les applications de l’App Store d’obtenir le consentement des utilisateurs avant de capter puis de partager avec des partenaires leurs données à des fins publicitaires. Selon plusieurs sources du secteur, le taux d’acceptation serait autour de 50 %. Autrement dit, la moitié n’accepte pas de monétiser leurs données.

Dernier coup dur pour Meta : selon le Wall Street Journal, le comité européen de la protection des données (CEPD) a pris la décision en date du lundi 5 décembre qu’Instagram ou Facebook ne pourront plus traquer les personnes qui ne le souhaitent pas. Jusqu’à présent les plateformes arguaient que le traçage était indispensable.

Baisse des budgets pub

Autre élément : la crise économique qui pointe le bout de son nez. Depuis le retour de l’inflation, la fin de l’argent pas cher décidé par les banques centrales, et la guerre en Ukraine, les indicateurs économiques basculent peu à peu dans le rouge avec des récessions de PIB qui se profilent. Les entreprises aussi voient leur taux de croissance ralentir et tranchent en faveur de baisses des budgets dédiés à la publicité digitale. Selon les estimations de MAGNA, les dépenses des annonceurs sur les réseaux sociaux ont enregistré un recul de 2 % dans le monde au deuxième trimestre 2022.

Facebook et Instagram face à la concurrence féroce

Enfin, les comportements changent. Si la pandémie avait boosté les usages en ligne, les déconfinements ont calmé la consommation d’écran. Un phénomène que Mark Zuckerberg n’avait pas anticipé puisqu’il a autorisé l’embauche de 27.000 personnes en 2020 et 2021, et 15.000 en 2022 alors que cette même année, Facebook enregistrait pour la première fois de son histoire une baisse du nombre des utilisateurs. Le patron de Meta a lui même parlé d’ « erreur » d’appréciation de sa part.

S’ils se détournent de Facebook, les internautes se dirigent vers la concurrence. Ces dernières années, Snap et surtout TikTok ont mené la danse sur les réseaux sociaux. Quand le premier créait son format story, Instagram l’imitait dans la foulée. Quand le second cartonnait avec ses courtes vidéos, Meta sortait le format Reels pour ses plateformes.

D’après l’analyse de Sensor Tower, les utilisateurs passeraient près de deux fois plus de temps quotidien sur TikTok (95 minutes) que sur Facebook (49 minutes) et Instagram (51 minutes).

Au fait, les milliards dans le Métavers, bonne ou mauvaise idée ?

Face à ces perspectives moroses, Mark Zuckerberg a voulu donner un horizon appétissant aux investisseurs et s’est jeté à corps perdu dans le métavers. Parmi les quelque 42.000 embauches citées plus haut, un nombre important est consacré au développement de son propre métavers, Horizon Worlds. 100 milliards de dollars sont investis sur dix ans.

Hélas, en 2021, sa division Métavers enregistrait une perte de 10 milliards de dollars, et 9,5 milliards de janvier à septembre 2022. Rien de plus normal pourrait-on se dire. Ce projet colossal nécessite à la fois des investissements faramineux dans les premières années et du temps pour attirer les utilisateurs. Seulement voilà, un an après les annonces en grande pompe, il n’y a quasiment personne sur les différents métavers. Comme si la mayonnaise ne prenait pas. De son côté, Mark Zuckerberg continue d’y croire : « Nous faisons un travail d’importance historique. »

C’est quoi la suite pour Meta ?

Si le marché commence à douter du métavers, il semble plus serein quant aux investissements de Méta dans l’intelligence artificielle (33 milliards en 2022, 40 milliards en 2023). Meta compte sur l’intelligence artificielle pour améliorer au maximum son ciblage publicitaire ainsi que ses contenus vidéos, et in fine, garder voire augmenter son nombre d’utilisateurs. D’ailleurs d’ici la fin de l’année, 100 % des Reels de votre fil d’actualité Facebook seront le produit de l’intelligence artificielle.

Source: Start.les Echos

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