Sur la seule année 2021, les investissements en capital-risque ont atteint 5,2 milliards de dollars au bénéfice de 604 entreprises uniques en Afrique, rapporte l’Association africaine de capital-investissement et capital-risque (AVCA) dans son dernier rapport fraichement publié. C’est un niveau jamais atteint, soit près de 5 fois celui de 2020 et bien plus que les 5 milliards de dollars investis au total entre 2014 et 2020, soit sur sept années. « Cette augmentation annuelle est particulièrement impressionnante compte tenu de la baisse de financement observée en 2020, qui a vu un resserrement marginal des cordons de la bourse des investisseurs à la suite de la pandémie de Covid-19 », commentent les experts.
La Tech rafle 81% des investissements
Ces chiffres témoignent une fois de plus de l’attractivité du continent pour les investisseurs en capital-risque. Et lorsque ces derniers misent dans les entreprises africaines, ils s’intéressent en priorité au secteur de la Tech. Ainsi, les entreprises technologiques ou axées sur la technologie tout en opérant dans divers secteurs (Fintech, e-commerce, HealthTech, HRTech, MobilityTech, InsurTech, Supply Chain Tech…) ont absorbé 81% des 5,2 milliards investis l’an dernier. L’industrie et la consommation discrétionnaire notamment sont les autres secteurs ayant bénéficié des investissements.
En moyenne, un fonds de capital-risque mise 8 millions de dollars dans une entreprise africaine. L’AVCA a enregistré 16 transactions de plus 100 millions de dollars chacune et portées par quinze entreprises.
Après les Etats-Unis et l’Europe, place à l’Afrique ?
Par définition, le capital-risque ou venture capital est cette activité d’investissement capitalistique qui consiste à prendre une participation minoritaire et temporaire dans le capital des jeunes entreprises innovantes à haut potentiel de croissance, afin de doper leurs fonds propres. Apparue dans les années 1940, la pratique est largement répandue aux Etats-Unis où les investissements en capital-risque ont dépassé les 130 milliards de dollars en 2019 -contre 60 milliards de dollars en 2015- et concernent plusieurs milliers d’entreprises, indique le rapport conjoint du fournisseur de données PitchBook et l’Association nationale américaine de capital-risque (NVCA).
En Europe, le venture capital poursuit sa croissance avec des investissements de plus de 100 milliards de dollars en 2021 selon Statista, avec le Royaume-Uni (34,9 milliards de dollars), l’Allemagne (17,2 milliards de dollars) et la France (11,4 milliards de dollars) en tête.
En Afrique, le capital-risque fait ses premiers pas vers les années 2000. L’Afrique du Sud, longtemps resté en tête, est désormais devancée par le Nigéria qui s’érige en premier marché africain avec 145 entreprises ayant levé 1,1 milliard de dollars en 2021. Le pays de Muhammadu Buhari place ainsi l’Afrique de l’Ouest au sommet de l’industrie. Viennent ensuite l’Egypte (98 deals pour 484 millions de dollars), le Kenya (87 deals pour 225 millions de dollars) et le Ghana (23 deals pour 78 millions de dollars) qui boucle le top cinq.
Le dynamisme économique observé à travers le continent dès les années 2010 avec en outre la révolution digitale et entrepreneuriale née du mobile money a accru l’intérêt des fonds d’investissement pour les pépites africaines. Même si l’Afrique anglophone continue d’occuper le devant de la scène, l’Afrique francophone a considérablement émergé ces dernières années. C’est le cas du Maroc (6ème marché africain du capital-risque en 2021 selon l’AVCA), le Sénégal (7è) et la Côte d’Ivoire (9è). Le Rwanda arrive, quant à lui, dixième.
Les volumes sont certes encore loin de ce qui s’observe aux Etats-Unis et en Europe. Mais les experts de l’AVCA estiment que l’industrie africaine du capital-risque « est sur le point de connaitre une énorme croissance ». Il serait aisé de leur accorder le bénéfice du doute car le boom observé actuellement, plusieurs experts l’ont vu venir à l’époque. « L’industrie du capital-risque en Afrique, nécessaire à la croissance des futurs poulains africains, en est encore à ses débuts, mais celle-ci promet un développement rapide dans les prochaines années », affirmait Kenza Lahlou, fondatrice et managing partner d’Outlierz Ventures, fonds de capital-risque dédié aux startups africaines basé au Maroc- dans une analyse publiée sur LTA en novembre 2017. Elle s’appuyait en effet sur le développement observé à partir de 2012.
De nouveaux acteurs
Si la montée du capital-risque sur le continent est dopée par l’accroissement des investissements des acteurs traditionnels, les experts notent également l’arrivée de nouveaux acteurs dont les gestionnaires des fonds de capital-risque d’Asie-Pacifique. Les fonds singapouriens ont, à titre d’exemple, pris des participations dans 22 jeunes entreprises uniques africaines en 2022 pour la première fois.
Les investisseurs américains -qui ont participé à 357 transactions de capital-risque en Afrique en 2021 contre 268 deals entre 2014 et 2020- se sont particulièrement fait remarquer avec les mouvements des personnalités telles que le milliardaire Jeff Bezos à travers Bezos Expeditions ou le co-fondateur de Twitter Jack Dorsey par le biais de sa société d’e-paiement Block. Ils ont été, d’après le rapport, sur d’importantes transactions en valeur.
Les autres investisseurs viennent du Canada, du Royaume-Uni, des Pays-Bas, d’Allemagne, de Chine, des Emirats arabes unis ou d’Arabie Saoudite. La France s’est engagée dans 28 entreprises uniques l’an dernier contre 17 entreprises tout au long des sept précédentes années. On sait notamment que l’Agence française de développement (AFD) a investi 3 à 7 millions de dollars dans des fonds de capital-risque soutenant les startups africaines au travers notamment de sa filiale Proparco.
Les business angels et fonds d’investissement africains qui marquent considérablement leur présence dans l’industrie du capital-risque sont répertoriés en Afrique du Sud (74 deals en 2021 contre 58 sur les sept précédentes années), au Nigéria (63 deals contre 22), en Egypte (33 deals contre 12) et au Kenya (16 deals contre 11).
Pression pour les jeunes entreprises des autres secteurs ?
Pour les experts, toutes ces données sont le signe que le capital-risque a encore de beaux jours de lui en Afrique. D’ailleurs, le rapport d’activité global 2021 de l’AVCA présente un exercice « exceptionnel » pour l’investissement privé en général avec une collecte atteignant un niveau record de 7,4 milliards de dollars, tiré par les transactions de capital-risque. Alors que le financement a toujours été l’un des plus gros talons d’Achille du développement des très petites et moyennes entreprises sur le continent -pourtant dominantes dans le tissu économique-, le capital-risque pourrait ainsi s’ériger en solution d’excellence pour la jeune pousse africaine, mais la nécessité pour les entreprises -n’ayant pas la Tech pour cœur de métier- de se remuer pour davantage attiser l’appétit des investisseurs, pourrait devenir pressante.
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